• Ayyanar combat les esprits maléfiques


         Un féroce cavalier sur un cheval blanc, semble menacer le passant de son sabre ou de son fouet. Il s'agit du dieu Ayyanar (ou Aiyanar, Ayanar, Aiyanaar), le gardien des villages, ou de son second Karuppaswami. Ses traits grimaçants témoignent de sa puissance surnaturelle. Comme un acteur de Kathakali, le dieu surjoue la colère et le courage, roulant des yeux farouches pour repousser les esprits maléfiques qui menacent les paisibles villages du Tamil Nadu en Inde.
     
     
     
     
     
    Ayyanar ou Karuppaswami, dieu tamoul, gardien des villages


     
     
       Les statues d'Ayyanar, souvent monumentales, sont soigneusement peintes de couleurs vives comme toutes celles des dieux hindous. Le style appliqué n'est pas sans rappeler l'académique imagerie saint-sulpicienne, en plus exotique. Le doux visage du Christ et ses gestes apaisants laisse la place à des gesticulations guerrières. L'âne, le boeuf et l'agneau sont remplacés par l'éléphant, la vache et le cheval. La mièvrerie européenne et l'expressionisme indien se retrouvent dans la même célébration, involontaire, du kitsch
     
     


    Aiyanar ou Karuppaswami, dieu tamoul, gardien des villages
    enceinte rayée de rouge et blanc
     
     
     
     
     
         Le culte d'Ayyanar, très populaire, est partout présent en Inde du Sud, au Tamil Nadu. Bien que né de l'union de Shiva et de Vishnou, sous l'apparence féminine de Mohini, Aiyanar n'appartient pas au panthéon hindou, c'est un dieu local. Aiyanar protège les villageois des esprits mauvais, des inondations et des sècheresses qui menacent les communautés agricoles. Il garde le réservoir, essentiel à la survie du village.
     
     
     
     
     
    Karuppaswami, armé d'un sabre, combat le mal aux côtés d'Aiyanar
     
     
     
     
     
         Ce dieu guerrier est toujours escorté de Karuppaswami son lieutenant armé d'un sabre, de 21 déités de moindre importance et d'une multitude de serviteurs. Il est parfois malaisé d'identifier tous ces dieux et demi-dieux et les indiens rencontrés sur place donnent parfois des informations contradictoires mais tous s'accordent sur la puissance protectrice d'Aiyanar. La nuit, Aiyanar et son armée veillent. Ils galopent tout autour du village et repoussent les esprits du mal dans un combat sans fin. Yallee, celui qui voit dans toute les directions et dans le futur, les guident.
     
     
     
     
    Ayyanar, Karuppaswami et les 21 dieux secondaires
    représentés autour du cheval blanc


     
        Pour résoudre leurs problèmes quotidiens, les villageois consultent un kodangi qui communique avec les dieux. Il ne s'adresse pas directement à Aiyanar, il est trop puissant, mais à son second Karuppaswami. Le kodangi, possédé par ce dieu secondaire entre en transe puis, comme un oracle, transmet aux villageois quelles offrandes ils doivent apporter aux dieux pour obtenir santé, richesse et paix spirituelle.
     
     
     
     
     
    Eléphants et poupées,
    offrandes en terre cuite pour Aiyanar, le dieu des villageois
     
     
     
     
        Les temples et les sanctuaires d'Aiyanar sont toujours à l'extérieur des villages, près d'un bois sacré. L'enceinte du temple est souvent décoré de rayures rouges et blanches qui signifient la limite entre le sacré et le profane. Les prêtres qui y officient sont de la caste des potiers, Velar, et non des brahmanes. Leur charge est héréditaire. Avec de l'argile, les potiers modèlent les grandes statues de chevaux, d'éléphants et de dieux qu'on voit à l'entrée ou dans l'enceinte du temple. Certaines effigies ont plus de cent ans.
     
     
     
     
     
    Groupe de statues: Aiyanar, l'éléphant et le cheval
     
     
     
     
        Le prêtre-potier fabriquent aussi les statuettes votives en forme d'éléphants, de vaches, de chevaux ou de poupées pour le festival d'Aiyainar. Au printemps, une procession de fidèles apportent les offrandes de terre cuite au temple ou au sanctuaire. Honorer un des 21 dieux revient à honorer Ayyainar. lui-même car il est le chef. 
     
     
     
     
     
    sanctuaire d'Aiyanar à Namana Samudram au Tamil Nadu
    Allée bordée de statues d'animaux en terre cuite
     
     
     
     
     
        Les 21 dieux reflètent la hiérarchie sociale du village. Les dieux des castes supérieures sont végétariens et ceux des castes inférieures sont non végétariens. Bien que les sacrifices d'animaux soient interdits il y a parfois des sacrifices de chèvres ou de coq.
     
     
     

    Tête de cheval, sanctuaire d'Aiyanar à Namana Samudram au Tamil Nadu

       


    Liens sur ce blog:
     
     
     Palagret
    Textes et photos
    octobre 2008
     

    Sources:
    1-
    Aiyanar and Aiyappan in Tamil Nadu :
    Change and Continuity in South Indian Hinduism


    2- L’ethnographie contre l’idéologie
    Le cas de l’hindouisme    Robert Deliège


    3 - Terra Cotta sculptures of India by Ron du Bois




     

     

     
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  •    Plus grandes que nature, les statues d'Ayyanar (ou Aiyanar), le dieu tamoul protecteur des villages indiens, étaient souvent fabriquées sur place, dans l'enceinte du temple ou du sanctuaire.  Cinq ou six artisans, sous la direction du prêtre-potier de la caste des velars, travaillaient une vingtaine de jours pour achever une oeuvre en terre cuite de plus de deux mètres de haut.

     

    Statue en terre cuite de l'éléphant d'Ayyanar
    sanctuaire de Namana Samudram, Tamil Nadu
     
     
         Avant de commencer le travail, la terre doit être consacrée. Le sang d'un coq décapité délimite un cercle. Des demi noix de coco sont placées autour ainsi que des petits pots contenant de l'alcool fait maison. Une fois le dieu honoré par des offrandes, des chants et des prières, le travail peut commencer.

     

    Potier préparant une statue d'Ayyanar
    Photo Ron du Bois

     

         L'argile est soigneusement choisie puis mélangée avec de la terre et de la bouse ou de la paille de riz. Une armature de bois ou de bambou entourés de corde de riz rigidifie le squelette sur lequel la boue est appliquée à la main.

     

    Potier travaillant sur l'armature d'un cheval dédié à Ayyanar
    Photo Ron du Bois

        De l'argile plus fine, toujours appliquée à la main, modèle les 21 déités secondaires et les serviteurs d'Aiyanar qui entourent le cheval ou l'éléphant, véhicules du dieu. Les détails de la monture, les harnais et le collier de clochettes ou de grelots sont finement reproduits.



    Détail de l'éléphant dans le sanctuaire d'Aiyanar,
    Namana Samudram, Tamil Nadu

     

        Au contraire des potiers occidentaux qui utilise un four déjà prêt et qui font rarement des pièces aussi grandes, les velars indiens construisent le four autour de la statue en montant des murs de briques. Elle est recouverte de paille, de bois, de bouse. Une fois cuite, la statue est peinte de couleurs vives qui rehaussent les détails du visage et du costume.



    Deux petits éléphants d'argile peinte
    à Narthamalai, Tamil Nadu



         De nos jours, les nouvelles images d'Aiyanar et de sa cohorte de déités sont souvent coulées en béton, plus résistant et plus facile à travailler. Le style, kitsch à nos yeux, et l'iconographie très codifiés, restent les mêmes.



    Liens sur ce blog:

     le dieu Ayyanar

    le sanctuaire d'Ayyanar à Namana Samudram

    Autres maîtres de l'Inde: Ayyanar, statues votives au Quai Branly

     

    les rayures rouges et blanches des temples hindouistes
    la fête de la déesse Saraswati à Bénares


    Catherine-Alice Palagret
     
     
    Photos couleur: C.A Palagret
    Source: Terra Cotta sculptures of India by Ron du Bois
     
    Mots clés: Ayyanar, Aiyanar, Namana Samudram, Tamil Nadu, terra cotta, velar, potier
     

     

     
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