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Par Palagret le 15 Août 2013 à 12:00
- Ahaé est un vieux monsieur coréen milliardaire qui peut se permettre de louer l'Orangerie de Versailles pendant deux mois pour y exposer plus de 220 photos de nature. De l'aube au coucher du soleil, saison après saison, Ahaé photographie la nature qui vit devant sa fenêtre.
Fenêtre sur l’extraordinaire, exposition photographique d'Ahaé à l'Orangerie de Versailles
Sous les magnifiques voûtes de 13 mètres de haut de l'Orangerie, dans une scénographie de Guy Oliver, se déploient sétaires vertes, loriots de Chine, bulbuls à oreillons bruns, bergeronnettes des ruisseaux, pies bleues, chevreuils des marais, arbres, lever et coucher de soleil, nuages et reflets dans l'eau.
Fenêtre sur l’extraordinaire, exposition photographique d'Ahaé à l'Orangerie de Versailles
“Cette exposition est un avertissement silencieux à propos du réchauffement climatique et de notre mentalité" déclare Keith Yoo, le fils d'Ahaé et le commissaire de l'exposition. En effet, sous l'oeil attentif d'Ahaé, la nature change et les saisons ne sont plus comme elles étaient.
Fenêtre sur l’extraordinaire, exposition photographique d'Ahaé à l'Orangerie de Versailles
Ahaé possède une quarantaine d'appareils photos et d'objectifs de haute technologie. Il travaille sans lumière artificielle, sans pied et sans manipulation photoshop sur ordinateur. Ce sont des photos naturalistes, réalisées avec obstination et même obsession.
Fenêtre sur l’extraordinaire, exposition photographique d'Ahaé à l'Orangerie de Versailles
La plus grande photo de l'exposition, 5 mètres x 12,5, "Vaguelettes sur l’étang" (Gold Plates) est aussi la plus grande photographie numérique jamais exposée.
Gold plates, Fenêtre sur l’extraordinaire, exposition photographique d'Ahaé à l'Orangerie de Versailles
"En quatre années de travail, Ahae n’a réussi à capturer ce moment qu’une seule fois. Il nous prouve qu’il s’agit d’être patient pour déceler dans la nature des trésors cachés", déclare Keith Yoo.
La faune, Fenêtre sur l’extraordinaire, exposition photographique d'Ahaé à l'Orangerie de Versailles
Les photos sont classées par thème: les oiseaux, les animaux, l'eau, les nuages. Les photos sont belles, charmantes, mais la profusion d'oeuvre est un peu étouffante et si Ahaé est un excellent photographe, il n'est peut-être pas un grand photographe. Il a le temps et les moyens de faire plus de deux millions de clichés, d'exposer à ses frais dans des lieux prestigieux (le jardin des Tuileries, Versailles, Moscou, Prague, Kew gardens à Londres, Florence et Venise, Grand central terminal à New-York) et de distribuer des cartes de visite illustrées. Les expositions sont toujours gratuites mais les visiteurs n'hésitent pas à acheter des posters, des catalogues ou des tirages de ses photos très séduisantes.
Fenêtre sur l’extraordinaire, exposition photographique d'Ahaé.
Au fond statue équestre de Louis XIV du Bernin. à l'Orangerie de Versailles
Cette nature sauvage captée par Ahaé est un écho ironique aux parterres policés dessinés par Le Nôtre dont on fête le 400è anniversaire de naissance. Les jardins à la française de Versailles avec leurs entrelacs de buis, leurs ifs taillés et leurs allées rectilignes illustrent une nature domestiquée par la géométrie, une nature asservie au caprice du roi. Au contraire, le bois et l'étang d'Ahaé ne se plient à la volonté d'aucun jardinier.
La dentelle de buis et les ifs taillés du parterre de l'Orangerie de Versailles
L'exposition de Ahaé, "Fenêtre sur l’extraordinaire", est une occasion unique de visiter l'Orangerie de Versailles, un bâtiment rarement ouvert au public car il a gardé sa vocation première: protéger les orangers et les citronniers pendant l'hiver. Parfois on y donne des bals, on y voit des défilés de haute-couture (Christian Dior en 2007) et des évènements privés très sélects qui ne concernent pas le petit peuple. S'y trouvent deux importantes sculptures du XVIIè siècle: la statue équestre du roi-soleil de Bernini et "l'enlèvement de Proserpine" de François Girardon.
"Fenêtre sur l’extraordinaire", photographies de Ahaé.
Orangerie du château de Versailles, allée de la Dormeuse
Du 25 juin au 9 septembre 2013.
Tous les jours, de 10h à 18h sauf du 6 au 8 juillet et du 4 au 6 août 2013.
accès gratuit le lundi, mercredi, jeudi et vendredi
payant les jours de Jardins musicaux et de Grandes Eaux le mardi, samedi et dimanche.
Lien sur ce blog:
Ahae, "de ma fenêtre" un univers frémissant et paisible aux Tuileries
Le photographe milliardaire Ahae est un escroc recherché par le FBI
Palagret
photographie naturaliste
août 2013
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Par Palagret le 1 Décembre 2012 à 12:00
Photo interdite, amende 1000 euros, annonce une affiche! Le Museum of Everything ne plaisante pas. Les médiateurs bénévoles vont-ils rançonner les visiteurs qui n'ont pas remarqué l'interdiction? Est-ce bien légal ou est-ce de l'humour dans un lieu habité de l'esprit de déraison?
Photographie interdite, amende 1000€, Museum of Everything
Alors que le Museum of Everything se présente comme un contre-musée où sont exposés une ribambelle d'artistes non conventionnels, autodidactes, doux illuminés et obsédés, le Musée se comporte exactement comme les Grands Musées qui exposent des artistes "normaux". Comme le Musée d'Orsay qui interdit la photographie.
Entrée du Museum of Everything, boulevard Raspail
Il s'agit ici aussi de protéger la vente de cartes postales et de catalogues, de mugs, de sacs et autres objets estampillés Museum of Everything. Il est vrai que ce musée est une organisation sans grands moyens et a besoin d'argent. De là à menacer ses visiteurs! Heureusement internet n'est pas si avare et on trouve des images et des videos des nombreux artistes exposés ici boulevard Raspail.
Museum of Everything, poteau de signalisation loufoque
Le Museum of Everything présente une histoire alternative de l'art pleine de poupées bizarres, d'épouvantail et de totems (Calvin Black, Hawkins Bolden, William Dawson, Nek Chand), de diatribes religieuses peintes sur des panneaux de bois (Revérand Jesse Howard, William Blayney) et de palais minuscules (ACM).
collage de Felipe Jasus Consalvos 1
Museum of Everything
14 boulevard Raspail, Paris 7ème
du mercredi au dimanche de 11h à 19h
jusqu'au 24 février puis prolongé jusqu'au 31 mars 2013
ouvert à Noël et Jour de l'An
www.chalet-society.fr
Museum of Everything, livre d'or
1- Oeuvre non exposée trouvée sur le net
Palagret
art brut
décembre 2012
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Par Palagret le 2 Septembre 2012 à 12:00
Ours blanc, sanglier, élan, panthère, loup, chien de chasse, oiseaux, tous ces animaux peuplent le Musée de la chasse et de la Nature dans le bel hôtel Mongelas. Un bestiaire empaillé, peint, sculpté ou gravé. S'y mêlent quelques animaux fabuleux comme la licorne, des armes précieusement ouvragées et des objets bizarres comme le fusil à tirer dans les coins.
Couple de panthères naturalisées et céramique de Françoise Pétrovitch
Salle des Trophées, Musée de la Chasse
Au milieu de cette ménagerie sauvage se cachent des créations d'art contemporain: le plafond de chouettes de Jan Fabre, le chien de Jeff Koons, le bézoard enchâssé de perles de Jean-Michel Othoniel, la cabane de Mark Dion etc ...
Chiens de chasse, cor de Pii et chien de Jeff Koons
Salon des chiens, Musée de la Chasse
Depuis 2007, le Musée de la Chasse et de la Nature confie des expositions temporaires à des artistes contemporains comme Laurent Millet, Françoise Pétrovitch ou Marc Couturier. Après les expositions certaines pièces restent en place comme les cabinets de Françoise Pétrovitch.
Cabinet du sanglier de Françoise Pétrovitch
Salle du Sanglier, Musée de la Chasse
Au contraire du Musée d'Orsay, le Musée de la chasse et de la Nature à Paris autorise les photographies des œuvres permanentes et des expositions temporaires. Les gardiens pallient au manque de cartels en renseignant les visiteurs qui ont du mal à trouver ou à identifier les artistes.
Cages de Françoise Pétrovitch, Musée de la Chasse
Musée de la Chasse et de la Nature
Hôtel de Mongelas, 60 rue des Archives
75003 Paris
Ours blanc et canards, Salon des Oiseaux, Musée de la Chasse
Lien sur ce blog:
Les terrines zoomorphes du Musée de la Chasse, faïences polychromes
Palagret
musées
septembre 2012
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Par Palagret le 1 Août 2012 à 12:00
Certains musées nationaux, comme le Musée d'Orsay, interdisent de photographier les oeuvres. De quel droit? Les tableaux et les sculptures appartiennent à l'Etat donc au peuple français. L'argument invoqué? Ne pas gêner les visiteurs. Qu'est-ce qui gêne le plus? Les groupes agglutinés devant un tableau écoutant leur guide ou les photographes amateurs qui veulent garder un souvenir de leur visite sur leur smartphone ou leur appareil photo?
Deux visiteurs photographient "le docteur Gachet"
tableau de Vincent Van Gogh au Musée d'Orsay
Il est certes assez niais de se faire photographier devant une œuvre célèbre (J'y étais!) mais pourquoi pas. A chacun son style et ses capacités techniques. Il est très difficile de photographier un tableau sans un pied rigoureusement posé au centre, de l'éclairage, du temps et de nombreux essais. Les couleurs des photos amateurs sont rarement fidèles, les lignes parallèles ont tendance à s'incurver et des reflets se baladent sur l'image. Reflets que voient les visiteurs sur les tableaux protégés d'une vitre comme la Joconde.
Groupe de visiteurs photographiant la Joconde au Louvre
Les musées qui interdisent la photo ne cherchent pas à garantir une qualité professionnelle aux reproductions. Non, ils veulent avant tout préserver leurs recettes sur les catalogues et les cartes postales. Malheureusement seule une infime partie des collections existent en carte postale.
Un visiteur photographie "le poisson rouge", tableau d'Henri Matisse à Beaubourg
Au Musée d'Orsay, le visiteur lambda qui paye son billet n'a pas le droit de faire des photos mais ce n'est pas le cas des invités lors des soirées privées. Le Musée d'Orsay s'offusque des photos amateurs qui ne lui rapportent rien mais les publicités géantes sur sa façade ne le gênent pas. Au contraire, elles rapportent de l'argent pour financer les travaux.
Affiche de sensibilisation à la bonne conduite au musée du LouvrePas de photographie avec flash
D'autres musées n'interdisent que l'usage du flash comme le Musée du Louvre ou le Musée d'Art Moderne à Beaubourg, bien que la nocivité du flash sur les couleurs ne soit pas scientifiquement démontré. Il est vrai que des flashes trop nombreux gêneraient les autres visiteurs.
Deux visiteurs photographient "Intérieur, bocal de poissons rouges"
tableau d'Henri Matisse à Beaubourg
Pour les expositions temporaires, parfois on a le droit de photographier, parfois non. Les gardiens font respecter l'interdiction avec plus ou moins de zèle. Souvent ils en ont assez de jouer les flics et regardent ailleurs.
D'autres musées encore utilisent la photo amateur comme un outil de promotion et demandent aux visiteurs de déposer leurs photos sur leur site. Attention, en envoyant votre photo, vous perdez tout droit dessus. Le musée peut en faire ce qu'il veut et la revendre.
Les Rois Mages s'éveillant, détail de la cathédrale Saint-Lazare d'Autun
La Cité de l'architecture, ancien musée des Monuments français, publie sur Tumblr les photos de détail de sculpture envoyées par les visiteurs. Un an plus tôt, il était interdit de photographier les moulages.
Diable grimaçant du Jugement dernier, tympan de l'Abbatiale Sainte-Foy à Conques
Pour les Journées Européennes du Patrimoine (15 et 16 septembre 2012) vous pouvez envoyer une photo légendée jusqu'au 9 septembre. La meilleure photo de la semaine sera diffusée sur les réseaux sociaux et l'auteur recevra un ouvrage de la collection "Architecture et Patrimoine".
Isaïe, église abbatiale Sainte-Marie à Souillac
Il n'y a pas d'interdiction de photographier les bâtiments classés. Certains héritiers cependant, comme ceux d'Alfred Janniot, menacent de procès tout ceux qui publient des photos de ses sculptures. Des sculptures sur les façades de monuments publics, commandées, payées et entretenues par le contribuable depuis 1937. Janniot est mort en 1969, ses œuvres devraient tomber dans le domaine public 70 ans plus tard en 2039.
Skate-boarders devant le Palais de Tokyo
Sur Facebook dans le groupe orsaycommons, Bernard Hasquenoph mène une intéressante discussion sur le droit à photographier dans les musées et particulièrement au Musée d'Orsay.
Mise à jour: la photo enfin autorisée au Musée d'Orsay
Liens sur ce blog:
"Nous avons revu Orsay, tout est à revoir", campagne d'affichage ambigüe
Autres liens:
Cité de l'architecture sur tumblr
Les Journées Européennes du Patrimoine
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Par Palagret le 5 Juillet 2012 à 12:00
La fenêtre d'Ahae s'ouvre sur un petit bois d'érables, une prairie, un étang. Un paysage bucolique banal mais préservé de l'urbanisation. Sous l'objectif du photographe, le microcosme devient un univers paisible mais frémissant de vie.
4 photos de chevreuil. De ma fenêtre, Ahae, jardin des Tuileries
De l'aube au crépuscule et du printemps à l'hiver, Ahae photographie un monde simple où les herbes ploient sous le vent ou le passage d'un chevreuil. Un héron cendré s'envole poursuivi par une nuée d'oiseaux, les canards mandarins troublent à peine la surface de l'étang, les chevreuils paissent paisiblement et les nuages défilent dans le ciel, inlassablement.
Salle des paysages. De ma fenêtre, Ahae, jardin des Tuileries
Ahae, né en 1941, est un entrepreneur coréen, un inventeur, un producteur de thé bio en Corée et de lavande en Californie, un maître en arts martiaux, un défenseur de l'écologie et un millionaire. Il y a deux ans Ahae a décidé de se consacrer à la photographie dans son atelier rural à 100 km de Séoul. Pour lui pas besoin de voyages en avion dans des pays exotiques; dans son refuge, le monde est à ses pieds. Il suffit d'ouvrir les yeux.
L'eau, salle ovale. De ma fenêtre, Ahae, jardin des Tuileries
Pendant deux ans, à raison de 2000 à 4000 photos par jour, soit environ un million de clichés pris d'une seule et même fenêtre, Ahae a capturé les variations de lumière du soleil levant, le jeu de la pluie sur les feuilles, la torpeur de midi, avec différents appareils photos asiatiques et européens dont des télé-objectifs haut-de-gamme. Pour ne pas troubler la vie sauvage, Ahae n'utilise qu'un savon neutre, sans odeur et ne s'autorise ni chauffage ni air conditionné lorsqu'il ouvre sa fenêtre sur son théâtre de nature.
Salle des paysages. Aufond, oiseaux et chevreuils
De ma fenêtre, Ahae, jardin des Tuileries
La fenêtre du photographe est reproduite dans l'exposition, aux dimensions exactes. Elle ouvre sur le jardin des Tuileries et de nombreux visiteurs, prenant exemple sur Ahae, photographient les arbres qui bougent dans le vent. Il n'y a hélas pas de vie sauvage à observer mais les promeneurs se hâtant sous la pluie créent l'animation.
Reproduction de la fenêtre d'Ahae s'ouvrant sur le jardin des Tuileries
L'exposition "De ma fenêtre" s'organise par thème. Deux salles ovales, en référence à la salle des Nymphéas de Monet, présentent des images d'eau et de nuages. La salle centrale présente des paysages dont deux impressionnants caissons lumineux géants devant lesquels les spectateurs s'asseoient, méditant sur la beauté du monde. Sur les côtés, à droite les saisons et à gauche les oiseaux et chevreuils des marais. La scénographie est de Guy Olivier et Charles Matz.
Caisson lumineux de 5x10 mètres, le lac sous la neige
Après Grand Central Terminal à New York, Kew Gardens à Londres, Prague, Moscou, Florence et Venise, Ahae expose « De ma fenêtre », 101 photos, dans le Jardin des Tuileries. Pas à l'air libre dans le Jardin, comme aux jardins botaniques de Kew, mais dans un pavillon éphémère en bois situé près de la Seine, côté Concorde.
Le pavillon éphémère accueille l'exposition photographique de Ahae
Une des premières photos de l'histoire de la photographie prise par Nicéphore Nièpce représente un paysage vu de sa fenêtre. Ahae, dont le nom signifie enfant en coréen, retourne à ces origines enregistrant sans aucun trucage le réel devant ses yeux. Mais le réel est toujours modifié par l'observateur, par le cadrage, la focale de l'objectif, pas si objectif, et surtout le regard du photographe.
Affiche de l'exposition "De ma fenêtre" de Ahae dans le jardin des Tuileries
Les images d'Ahae deviennent une métaphore d'une nature idéale intouchée, où l'empreinte de l'homme est si légère qu'on ne la remarque pas. Une nature d'aujourd'hui ou d'hier, intemporelle, mais une nature menacée.
L'eau, salle ovale. De ma fenêtre, Ahae, jardin des Tuileries
Avant son exposition à Paris, Ahae s'est fait remarquer en achetant un hameau abandonné à Courbefy dans la Haute-Vienne. Son projet est "environnemental, artistique et culturel". Le photographe souhaite y appliquer son concept de "style de vie organique" c'est-à-dire "l'interconnexion entre la protection de la nature, l'agriculture biologique et la santé". La nature devrait s'y développer harmonieusement.
L'eau, salle ovale. De ma fenêtre, Ahae, jardin des Tuileries
Ahae, de ma fenêtre
du 27 juin au 23 juillet 2012
jardin des Tuileries côté Seine
10h - 22h, entrée libre
Lien sur ce blog:
Ahaé à l'orangerie de Versailles: nature à profusion, une fenêtre sur l'extraordinaire
Le photographe milliardaire Ahae est un escroc recherché par le FBI
Palagret
photographie naturaliste
juillet 2012
L'exposition à New-York, vibrancy and serenity
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Par Palagret le 5 Juin 2012 à 12:00
Le Maracana, un simple café aux couleurs vives à Bédarieux, une petite ville de l'Hérault, représentatif de la France tranquille. Un "paysage d'entre-deux", un "lieu de peu" comme les affectionne le photographe Raymond Depardon. Le temps est gris mais lumineux et fait ressortir les couleurs qui n'ont pas été retravaillées par ordinateur. Le café est vide, c'est probablement tôt le matin. Depardon photographie les traces humaines, les décors pas encore investis par la foule mais ce vide parle de l'humain.
Café le Maracana, Bédarieux, Hérault.
La France de Raymond Depardon, exposition à la BNF
"Si je pars du voyage, c’est bien pour avancer vers la présence de l’homme qui, par son intervention au fur et à mesure de l’histoire, a modifié le territoire. En ce début de troisième millénaire, c’est un état des lieux, une bonne occasion «d’arrêter» des photographies." 1
Café le Maracana, Bédarieux, Hérault. Resto, Le Bosc, Hérault
La France de Raymond Depardon, exposition à la BNF
Raymond Depardon, qui vient de réaliser le portrait officiel du nouveau Président de la République, nous apprend que François Hollande a accroché dans son bureau un tirage de cette photo du Maracana, exposée en 2010 à la Bibliothèque Nationale. Une photo représentative de la France profonde, des petites villes de province loin de l'agitation parisienne.
Café le Maracana, Bédarieux, Hérault
Photographié en juin 2012
On remarque que depuis le passage de Raymond Depardon à Bédarieux le café Le Maracana a changé. La belle couleur orange flamboyant est recouverte d'un crème plus discret et d'un soubassement marron. Les enseignes et le store rayé rouge et blanc sont toujours là. Les fauteuils en alu et plastique vert aussi. Les volets verts et le balcon ouvragé typique des villes du sud n'ont pas changé. Le balcon rouillé est curieusement à moitié peint en crème à la limite de la façade du café.
Café le Maracana, Bédarieux, Hérault
Photographié en juin 2012
Raymond Depardon photographie ce que nous ne voyons plus: les petits commerces, les bar-tabac, les ronds-points. Il cadre frontalement ses sujets faisant ressortir leur banalité mais aussi leur fantaisie, leur "inquiétante étrangeté". Il laisse apparaître le bitume et les marques au sol qui envahissent l'espace et le domestique de plus en plus. Sur la photo du Maracana, le bitume est d'un noir profond; soit le revêtement était neuf, soit il venait de pleuvoir. Aujourd'hui le bitume est gris et de nouvelles lignes blanches interdisant le stationnement sont apparues.
Café le Maracana, Bédarieux, Hérault
Photographié en juin 2012
Un deuxième lieu a intéressé Raymond Depardon à Bédarieux, une droguerie, un ancien marchand de couleurs, où dominent le rouge, le vert et jaune.
"Je fais des photos que tout le monde pourrait faire, mais que personne ne fait."
Raymond Depardon
Droguerie, Bédarieux, Hérault
Photographié en juin 2012
La France de Raymond Depardon
30 septembre 2010 - 9 janvier 2011
BnF François-Mitterrand
Grande Galerie
Quai François-Mauriac - 75013 Paris
La France de Raymond Depardon, exposition à la BN
Lien sur ce blog:
Depardon: 36 vues de la France, c'est ainsi que les gens vivent, exposition à la BN
Texte et photos Palagret
archéologie du quotidien
juin 2012
Sources
Catalogue de l'exposition
1- Michel Lussault in Hors Série Télérama
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Par Palagret le 12 Octobre 2011 à 12:00
Il y a beaucoup de portraits à Photoquai 2011 et curieusement beaucoup de visages masqués, voilés, cachés dans des photos mises en scènes, staged photography, une manière conceptuelle de rendre compte du réel.
Taekwondo, Indonesian uniforms, Jim Allen Abel
Photoquai 2011, quai Branly
Dans la série Indonesian uniforms, l'indonésien Jim Allen Abel réalise des auto-portraits. Debout, de face, vêtu d'un uniforme, son visage porte un masque pour souligner la perte d'identité.
Indonesian uniforms, Jim Allen Abel
Photoquai 2011, quai Branly
"Face à un policier, et même si son nom est inscrit sur son uniforme, on s'adresse à "Monsieur l'Agent", comme si l'individu n'existait plus." 1
Dans Taekwondo, Jim Allen Abel porte un masque faite de ceintures de couleur pour se moquer du culte de la performance.
Un militaire armé porte un masque fait de plumes oranges. Les guerriers aborigènes se parent souvent de plumes multicolores mais ici le contraste entre la légéreté des plumes et le métal du fusil est ironique.
Un homme en combinaison orange (un prisonnier?) a le visage couvert de mégots de cigarettes et un autre de nouilles dégoulinantes.
Soldat nouilles, Indonesian uniforms, Jim Allen Abel
"Jim Allen Abel est né en 1975 dans l’île des Célèbes. En 2002, avec des condisciples étudiants à l’Institut indonésien des arts de Yogyakarta, à Java, il fonde le collectif Mes 56, du nom de l’ancienne caserne de l’armée de l’air où ils s’installent. Ses membres entendent bousculer les conventions du genre photographique qui, en Indonésie, réduisent le photographe à un tukang tout juste bon à aligner les commandes. Dès 2005, diplôme en poche, Jim dépoussière le portrait académique en suivant les groupes de rock qui tournent à travers l’archipel."
Spring summer collection 2018, Hassan Hajjaj
Photoquai 2011
Les photographies de Hassan Hajjaj, né en 1961 au Maroc, témoigne de sa fascination pour les cultures urbaines, les produits de grande consommation, l’imagerie populaire et le pop art américain. Toutes de noir voilées, les femmes assises en terrasse porte des djellabas bariolées très kitschs et des lunettes en forme de coeur, des accessoires de mode incongrues, qui rendent le portrait ironique, sans aller aussi loin toutefois qu'Hussein Chalayan.
Spring summer collection 2018, Hassan Hajjaj
au fond photo de Kosuke Okahara
Photoquai 2011
D'autres photos montrent des femmes voilées de niquabs siglés Nike, Adidas ou Puma. «Les marques sont rassurantes. Elles attirent l’œil de suite, on les reconnaît. Elle créent un sentiment amical sur un objet qui, souvent, suscite le rejet, déclare Hassan Hajjaj .» 2
NIquab siglés, Hassan Hajjaj, Photoquai 2011
"Hassan Hajjaj crée des séries photographiques dont les mises en scène soigneusement élaborées témoignent de son admiration pour Samuel Fosso, Malik Sidibé et David La Chapelle. Dans ces images réalisées à Marrakech, il exploite les codes sophistiqués des milieux de la mode ou ceux des vidéoclips. Il parvient ainsi à transformer des jeunes femmes voilées et vêtues de djellabas en icônes de magazines et en stars du hip hop. Ces photographies qui passent au premier regard pour des fantaisies orientalistes, exploitent avec humour et dérision les effets de contresens et d’ambiguïté véhiculés par le voile et l’habit traditionnel. Les accessoires, ponctués ici ou là de logos haute couture ou sportwear, dépassent le plaidoyer de la condition féminine ou celui de l’orientalisme, pour révéler, par un effet de renversement, les lieux communs du modèle occidental et de sa société de consommation."
NIquab siglé Puma, Hassan Hajjaj, Photoquai 2011
Jamal Penjweny dissimule le visage de ses personnages derrière une photo de Saddam Hussein. Du temps du règne du tyran, pas une boutique, pas un bureau sans la photo de Saddam. On voyait son effigie partout, sur des affiches, de grandes fresques murales, des posters. Après la chute de Saddam, ses portraits ont disparu mais selon Jamal Penjweny, le tyran hante toujours la mémoire de son peuple.
"Saddam is here, Jamal Penjweny, Photoquai 2011
"Saddam est là. Les irakiens ne peuvent l'oublier, même après sa mort, parce que certains l'aiment encore et d'autres le craignent toujours. Il était une sorte de dieu, à la fois généreux et cruel, un "bon père" mais aussi un criminel. ... Son ombre plane sur nous."
"Saddam is here", Jamal Penjweny, Photoquai 2011
"Je ne photographie pas sur le vif. Ayant depuis 2003 beaucoup travaillé pour la presse, j'en suis arrivé à différencier le photojournalisme de la photographie. Mes premières images de Bagdad reflétaient des fragments de réalité; j'ai préféré ensuite rassembler ces fragments dans des scènes plus conceptuelles. D'où le projet "Saddam is here": pour explorer le rapport des irakiens à la figure du dictateur après la chute du régime."
"Saddam is here", Jamal Penjweny, Photoquai 2011
Liens sur ce blog:
Photoquai 2009, le monde en bord de Seine: Bittencourt, Naji, Jimènez, Sher
Photoquai sur les quais du métro l'Assemblée Nationale, photos du monde
Palagret
photographie
octobre 2011
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Par Palagret le 29 Décembre 2010 à 12:00
C'est ainsi que les gens vivent
Délaissant les monuments, les grandes villes et les banlieues, Raymond Depardon s'attache aux paysages de l'"entre-deux", aux "lieux de peu" 1. Des lieux qui se construisent tout seuls aux périphéries des villes, loin du regard des experts, urbanistes ou paysagistes, des lieux bricolés, hétéroclites, fragiles.
Parti communiste Français, Hérault
Café le Maracana, Bédarieux, Hérault. Resto, Le Bosc, Hérault
La France de Raymond Depardon, exposition à la BNF
Comme Eugène Atget, comme Walker Evans ou les New Topographics américains (1975, Stephen Shore, Robert Adams), les photos de Depardon ne montrent presque jamais les gens, elles montrent les traces laissées par l'occupation humaine, boutiques, cafés, enseignes, signes, panneaux de signalisation, fils électriques. Comme dans les 36 vues du Mont Fuji, estampes d'Hokusaï, le paysage, ici péri-urbain, est le plus souvent déserté.
La France de Raymond Depardon, exposition à la BNF
Les rues sont vides mais l'écho de la vie humaine se répercute doucement entre ces façades neuves aux couleurs fortes et ces murs décrépis. C'est un territoire habité tout au long des siècles et qui subit les bouleversements de la modernité. Une modernité en plusieurs strates où les années 2000 côtoient encore les années trente, cinquante et soixante.
Sélestat, Alsace
Le Portel, Pas-de-Calais
La France de Raymond Depardon, exposition à la BNF
"Si je pars du voyage, c’est bien pour avancer vers la présence de l’homme qui, par son intervention au fur et à mesure de l’histoire, a modifié le territoire. En ce début de troisième millénaire, c’est un état des lieux, une bonne occasion « d’arrêter » des photographies." Raymond Depardon
Garage, Saint-Claude, Jura
La France de Raymond Depardon, exposition à la BNF
Habituellement, les photographes évitent les poubelles, les fils électriques disgracieux, les enseignes trop voyantes, les publicités qui pourraient gâcher leur composition. Loin de la photo touristique, flatteuse, Depardon lui photographie la banalité de l'habitat et ses petites fantaisies éphémères, reflet de la vie réelle. Cadrées frontalement, ces lieux de peu nous sont familiers même si le regard ne s'y arrête pas.
"Je fais des photos que tout le monde pourrait faire, mais que personne ne fait."
Raymond Depardon
La France de Raymond Depardon, exposition à la BNF
Utilisant une chambre photographique de 20x25 cm, Raymond Depardon expose 36 impressions numériques de 2m sur 1,65, sélectionnés parmi les centaines de photos argentiques enregistrées pendant son périple à travers la France de 2004 à 2010. Placées côte à côte, sans indication de lieux, les photos à la précision et aux couleurs magnifiques sont impressionnantes par leur banale étrangeté. Guidé par sa seule fantaisie, Depardon dresse un inventaire non scientifique, poétique. C'est aussi un document, une documentation exacte sur un territoire péri-urbain, une France en pleine transformation, là où les gens vivent "loin de la foule déchainée".
Primod, Antibes, couleurs éclatantes,
La France de Raymond Depardon, exposition à la BNF
A la sortie de la grande salle, 36 diapositives identifient les lieux sélectionnés par Raymond Depardon. Ensuite vient une exposition pédagogique où le photographe cite ses influences et montre ses travaux préparatoires (carnets, cartes, polaroïds).
Identification des lieux
La France de Raymond Depardon, exposition à la BNF
La France de Raymond Depardon
30 septembre 2010 - 9 janvier 2011
BnF François-Mitterrand
Grande Galerie
Quai François-Mauriac - 75013 Paris
Façade du Parti Communiste Français, Le Vigan, Gard
La France de Raymond Depardon, exposition à la BNF
Lien sur ce blog:
Raymond Depardon: une photo du Maracana, café de Bédarieux, dans le bureau de François Hollande
Palagret
archéologie du quotidien
décembre 2010
Sources
Catalogue de l'exposition
1- Michel Lussault in Hors Série Télérama
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Par Palagret le 12 Juillet 2010 à 12:00
Que fait un astronaute lorsqu'il ne tourne pas autour de la terre? Redevenu terrien, il fait comme tout le monde nous montre le photographe américain Hunter Freeman. Vêtu de sa combinaison spatiale, l'astronaute a trouvé un petit boulot de technicien de surface. A la pause déjeuner, il va dans un restaurant pas trop cher puis il donne à manger aux pigeons.
L'astronaute au lavomatic, photo mise en scène d'Hunter Freeman
Les draps blancs se confondent avec la combinaison spatiale et la rue à l'arrière plan légèrement surexposée renvoie à un ailleurs intersidéral
Après le travail, il fait sa lessive à la laverie du coin, sa machine à laver a du rester en orbite. Puis il regarde à la télé un documentaire sur les termites ou une fiction sur les envahisseurs de l'espace. Le dimanche il cherche des trésors sur la plage avec un détecteur de métaux, comme s'il explorait encore le sol lunaire.
L'astronaute au parc nourrit les pigeons
photo mise en scène d'Hunter Freeman
La photo est en noir et blanc sauf l'astronaute, la part du rêve
Cet homme est seul et on le devine déprimé. Il voudrait s'arracher à la pesanteur terrestre mais il s'englue dans le quotidien. Ses semelles de plomb l'empêchent de marcher. Il s'accroche à sa gloire passée en gardant son blanc costume de chevalier de l'espace. Un déguisement probablement acheté sur internet.
Finalement, l'astronaute fait du stop pour Houston où l'attend peut-être une dernière mission pour Mars ou Pallas 21. En fait, il n'est pas du tout astronaute, c'est juste un homme qui voudrait avoir la tête dans les étoiles.
Les photos mises en scène d'Hunter Freeman associent un personnage héroïque à un décor d'une navrante banalité, à des activités dérisoires. De cette rencontre naît un univers ironique, loufoque et un peu triste.
Autres photos sur le site d'Hunter Freeman
Liens sur ce blog:
Il y a quarante ans, Neil Armstrong posait le pied sur le lune
Découverte archéologique: les Terres Calcinées de Pallas 21
Palagret
photographie
juillet 2010
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Par Palagret le 8 Janvier 2010 à 12:00Dans le parc de Sceaux, des agrandissements des clichés d'Eugène Atget sont installés à l'endroit même où le photographe posa sa chambre au printemps de 1925, alors que la végétation à l'abandon cernait les pièces d'eau et les statues illustrant des thèmes mythologiques.
voir début
Escalier et statue d'Hercule Farnèse, allée de Diane à Sceauxphotographie d'Eugène Atget, mai 7h du matin 1925
Dans la photo ci-dessus, Eugène Atget cadre un escalier de biais. ce qui donne du rythme à sa composition et, au fond à droite, une trouée de lumière donne de la profondeur. On voit en haut des marches la statue d'Hercule Farnèse, une copie de la sculpture découverte au XVIème siècle dans les thermes de Caracalla à Rome. Aujourd'hui la statue vue par Atget est remplacée par un Hercule Commode. L'empereur Commode aimait se faire représenter en Hercule vêtu de la peau du lion de Némée et appuyé sur l'énorme massue avec laquelle il massacrait ses adversaires.
Escalier et statue d'Hercule Commode, allée de Diane à Sceaux
Statue d'Hercule Commode à Sceaux
Plus loin, les jumeaux Castor et Pollux regardent vers le bassin de l'Octogone à peine visible, masqué par le foisonnement de la végétation. Une fois de plus, le groupe sculpté est pris de dos, le minéral et le végétal se confondent. Atget capte l'atmosphère désolé de la scène et son reportage photographique est plus une rêverie qu'une documentation précise, différant en cela de son inventaire du vieux Paris.
Groupe sculpté de Castor et Pollux
Eugène Atget juin 1925, à Sceaux
Groupe sculpté de Castor et Pollux, au parc de SceauxCes photos couleurs numériques prises fin mars 2009 sont une bien imparfaite reconduction du travail d'Eugène Atget. il y a 84 ans. On appelle « reconduction » la tentative de reproduire des clichés originaux, en essayant de retrouver l’emplacement de la chambre photographique, le cadrage et la focale, dans la même lumière. Cette démarche permet de révéler les modifications du sujet photographié. L'oeuvre d'Atget est un témoignage inestimable sur l'évolution du paysage du parc de Sceaux.
Domaine de Sceaux - 92330 Sceaux
Tél : 01.41.87.29.50
Atget au parc de Sceaux, photos d'hier et aujourd'hui I
Eugène Atget et la maison d'André Chenier à la pointe Trigano
PalagretphotographieSource:Dossier de presse
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