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Par Palagret le 7 Avril 2012 à 12:00
Pendant 12 heures le Grand Palais s'est transformé en cantine servant gratuitement de la soupe. Il s'agissait d'une performance artistico-culinaire de l'artiste Rirkrit Tiravanija. Sur de longues tables de bois, les convives dégustaient une soupe thaï servie par des bénévoles d'Emmaüs dans des bols recyclables. Il y avait là des touristes entrés par hasard, des visiteurs de l'expo Helmut Newton juste à côté, des bobos et fort peu de SDF. Sans internet et les articles culturels des journaux, les SDF n'ont pas eu accès à l'information. Ils auraient pourtant apprécié un bol de soupe et n'ont pu profiter de l'aubaine, artistique ou non.
Soup / no soup, performance de Rirkrit Tiravanija au Grand Palais
Sous la verrière, les comptoirs chargés de bols, de cuillères et de faitouts, les tables et les bancs paraissaient bien petits, perdus dans cet espace immense. Mais que se passait-il vraiment? Une fête populaire ou une installation d'art contemporain, une sculpture vivante, dont les visiteurs constituent l'oeuvre?
Soup : no soup, performance de Rirkrit Tiravanija par Palagret"Et l'art dans tout ça ? Tiravanija est l'un des représentants du courant que le critique Nicolas Bourriaud a théorisé en 1995 sous le label "Esthétique relationnelle". Manière de rassembler des artistes très variés derrière une même ambition : faire de l'art un lieu d'échange et de dialogue. Ou "l'art comme un état de rencontre". Tiravanija en est peut-être le plus bel exemple. Il a par exemple transformé un de ses espaces d'exposition en studio de musique où n'importe quel amateur pouvait venir répéter. Il a aussi fondé au nord de son pays, près de Chiangmai, une terre d'utopie appelée The Land : entre deux rizières, les plus grands artistes du monde sont invités à créer des cabanes idéales où vivre en communauté. Sans compter, on l'a dit, ses nombreux dîners. Où le "relationnel" se bornait souvent au réseautage du petit milieu de l'art, élite qui s'incrustait pour "socialiser" et disserter sur les dernières expositions visitées à New-York ou Sao Paulo.
Pour la première fois, la "Soup/No Soup" du Grand Palais s'ouvre réellement à tous." 1
Soup / no soup, performance de Rirkrit Tiravanija au Grand Palais
Dossier de presse: Soup/No Soup, Rirkrit Tiravanija
"En pré-ouverture de La Triennale 2012, Rirkrit Tiravanija est invité à transformer la Nef du Grand Palais en un gigantesque banquet festif dont le menu consistera en une soupe Tom Ka. De midi à minuit, le Grand Palais est gratuitement accessible au public afin de partager une soupe préparée et offerte par l’artiste et son équipe. Généreux mais modeste, collectif mais singulier, Soup/No Soup se veut un grand rassemblement où chacun pourra vivre une expérience immatérielle, basée sur la rencontre et la générosité."
Soup / no soup, performance de Rirkrit Tiravanija, nef du Grand Palais
"En créant et recréant des micro-communautés l’artiste puise toute l’énergie artistique dans les liens et les relations qui se nouent entre les participants dans ses projets. De spectateur passif, le visiteur devient acteur d’une œuvre en devenir. Fondé sur l'altérité, le nomadisme et le déplacement des signes et des contextes, le travail de Rirkrit Tiravanija est le plus souvent composé de points de rencontre, de communication et d'échange."
Soup / no soup, performance de Rirkrit Tiravanija au Grand Palais
"Cherchant à abolir la frontière entre l’art et la vie, l’artiste défie constamment les attentes, le statut et la forme de l’œuvre d’art. La production artistique originale, protéiforme et inclassable de cet artiste cosmopolite est acclamée sur la scène internationale depuis une vingtaine d’années. Ayant depuis longtemps renouvelé les codes de l’exposition et de l’espace, Rirkrit Tiravanija a rendu obsolète la dichotomie entre installation, sculpture et performance."
Soup / no soup, performance de Rirkrit Tiravanija, la cantine du Grand Palais
"Précédées par les travaux d'autres artistes contemporains engagés dans le domaine du culinaire, comme "Food" (1971-73), le restaurant de Gordon Matta-Clark, les oeuvres de Tiranavija créent un riche dialogue avec ce que Marcel Mauss désignait comme l'inéliabilité du don, ou, en d'autres termes, la possession, le don, la réception d'objets. En outre, bien que Tiravanija privilégie les recettes thaï dans ses repas, il évite les associations simplificatrices de l'exotisme, soulignant plutôt les dimensions intangibles et interpersonnelles de l'expérience partagée."
Soup / no soup, performance de Rirkrit Tiravanija au Grand Palais
"Avec Soup/No Soup, la Triennale déclare d'emblée son désir de fédérer toutes ses énergies autour d'un projet artistique à la fois ambitieux et ouvert à tous. Au-delà de cette version considérablement augmentée de Soup/No Soup, La Triennale 2012 présentera, au Palais de Tokyo, un autre projet de Rirkrit Tiravanija."
Le cuisinier et Rirkrit Tiravanija
Soup / no soup, performance de Rirkrit Tiravanija au Grand Palais
Grand Palais, Paris
Soup / no soup, performance de Rirkrit Tiravanija
samedi 7 avril 2012, de midi à minuit
accès gratuit
Palagret
cuisine et art contemporain
photos Palagret Creative Commons
avril 2012
Source:
1- in Le Monde, Emmanuelle Lequeux
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Par Palagret le 18 Mars 2012 à 12:00
Car casse modulable et participatif, Multiplicars, le projet de Benoist Buttin, s'est effondré comme prévu dimanche soir au Point Ephémère. Illustration ludique de la folie consumériste, les petites voitures empilées se sont éparpillées sur le sol. Les contributeurs ont choisi les plus belles pièces pour les photographier et envoyer le cliché à Benoist Buttin.
Multiplicars de Benoist Buttin au Point Ephémère
Multiplicars, Benoist Buttin au Point Ephémère... par PalagretMultiplicars de Benoist Buttin au Point Ephémère
Multiplicars de Benoist Buttin au Point Ephémère
Multiplicars de Benoist Buttin au Point Ephémère
Voir explications dans l'article précédent
Multiplicar en voyage
Multiplicars de Benoist Buttin
Co-conception Alexandre Diner
Dans le cadre du festival "Ici et demain 2012"
Entrée gratuite
Du vendredi 9 mars au dimanche 11 mars 2012
samedi de 12h à 2h, dimanche de 12h à 21h
Point Ephémère, 200 quai de Valmy, Paris
01 40 34 02 48
Lien sur ce blog:
Point Éphémère: auto-stop fantasmé au bord du canal Saint-Martin
Photos des voitures dans Paris
Palagret
archéologie du quotidien
mars 2012
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Par Palagret le 13 Mars 2012 à 12:00
Des serpents, ou des vers géants, aux couleurs acidulées occupent le sol de la galerie Emmanuel Perrotin. Un vivarium ludique et poétique où les boudins de tissus piqués de perles et d'épingles ne contiennent que du sable.
sans titre, 2011, détail, Lionel Estève
On reconnait les queues effilées des reptiles, les ventres gonflés mais pas les gueules ni les langues fourchues. Des simulacres de reptiles inoffensifs ou des boudins de porte pour arrêter les courants d'air. Des sculptures tout simplement.
sans titre, 2011, détail, Lionel Estève
L'installation poétique de Lionel Estève est bien loin de la démesure de Joana Vasconcelos, autre artiste travaillant le textile.
sans titre, 2011, détail, Lionel Estève
Dossier de presse
Le mystère est selon Lionel Estève le statut le plus enviable d’une œuvre d’art : anonyme, sans date et à l’origine incertaine. Il avait d’ailleurs élaboré un graphisme au sol (« myope et amnésique », CAC Brétigny, 2005) en résonance avec les immenses et inexpliqués dessins Nasca. A l’occasion de sa troisième exposition à la Galerie Perrotin, Lionel Estève développe un environnement, empirique et sensuel, constitué de sculptures longues de 10 à 15 mètres. ...
Passage(bleu), fausse porte et détail de sans titre, Lionel Estève
Quelques portes en trompe-l’oeil schématisées par de grosses poignées en verre et une ligne sur le mur inventent désormais une autre circulation à travers un espace mental imaginaire et inaccessible.
Une ligne / a line, 2011, 113 pierres, aquarelle, vernis acrylique,
Frontières, quatre tableaux, Lionel Estève
Lionel Estève reproduit librement la vision panoramique d’une voûte céleste composée de perles multicolores — tels ses mobiles fragiles en mouvement qu’il a précédemment montrés à la Galerie et ailleurs (Art Unlimited/Art Basel, 2005 ; Fondation Hermès, La Verrière, Bruxelles, 2011). Au pied de ce ciel étoilé, un paysage de pierres en partie peintes à l’aquarelle évoque le lit d’une rivière, l’espace d’exposition se métamorphose en site du Land Art.
Une ligne / a line, 2011, détail, 113 pierres, aquarelle, vernis acrylique, Lionel Estève
Frontière, détail, Lionel Estève
La troisième salle est recouverte de grands dessins aux motifs géométriques blanc sur blanc. Ces images fantomatiques fugitives convoquent l’art cinétique mais aussi le mouvement De Stijl (Theo van Doesburg, El Lissitzky) par leur économie de moyens et leur motifs à la fois dynamiques et aériens.
sans titre, 2011, et passage (rouge) 2012, Lionel Estève
Hors du réel, le lieu de l’exposition devient un espace intérieur hanté par des phobies à la fois attirantes et contradictoires. Les œuvres énigmatiques de Lionel Estève enveloppent le visiteur de leur secrets fantasmés, recréant un univers fictionnel proche de ceux de Lewis Carrol ou Magritte.
Lionel Estève
Du 14 janvier au 3 mars 2012
Galerie Emmanuel Perrotin
76 rue de Turenne, 75003 Paris
Liens sur ce blog:
Joana Vasconcelos, contamination textile à Versailles en juin 2012
L'art brut de Judith Scott: cocons multicolores et totems au Collège des Bernardins
Palagret
art contemporain
mars 2012
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Par Palagret le 9 Mars 2012 à 12:00
4000 petites voitures de carton empilées formeront une voiture, de la taille d’une demi-voiture « réelle », qui finira sans doute par s'écrouler. Multiplicars interroge la société actuelle autour de la production et de la consommation de masse.
Multiplicars de Benoist Buttin au Point Ephémère
Multiplicars de Benoist Buttin par PalagretMultiplicars est un projet participatif de Benoist Buttin, étudiant à l'Ecole Spéciale d'Architecture de Paris. Chacun peut venir au Point Ephémère, au bord du canal Saint-Martin, pour participer à cette expérience ludique. Il suffit de décorer et de plier une petite voiture, ou plusieurs, et de les ajouter aux autres. L'écroulement possible de cet entassement symbolisant le consumérisme est prévu dimanche soir.
Patrons de petites voitures à construire
Multiplicars de Benoist Buttin au Point Ephémère
Vendredi après-midi, il y avait encore peu de voitures pliées mais durant tout le week-end, les visiteurs vont fabriquer les modèles réduits et, couche après couche, une grande voiture stylisée prendra forme.
Multiplicars de Benoist Buttin au Point Ephémère
Décoration des modèles
Multiplicars de Benoist Buttin au Point Ephémère
Multiplicars de Benoist Buttin au Point Ephémère
voir la suite de l'empilage et son écroulement
Multiplicars de Benoist Buttin
Co-conception Alexandre Diner
Dans le cadre du festival "Ici et demain 2012"
Entrée gratuite
Du vendredi 9 mars au dimanche 11 mars 2012
samedi de 12h à 2h, dimanche de 12h à 21h
Point Ephémère, 200 quai de Valmy, Paris
01 40 34 02 48
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Point Éphémère: auto-stop fantasmé au bord du canal Saint-Martin
Palagret
archéologie du quotidien
mars 2012
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Par Palagret le 19 Février 2012 à 12:00
Une belle chouette effraie, ailes déployées, est prise au piège d'une cage faite de fils tendus où sont accrochées des mouches et des graines. Elle se reflète sur une surface polie noire. Le temps est suspendu. Avec Here is the End of All Things (Ici est la fin de toutes choses) Claire Morgan expose la plus belle oeuvre de Bêtes off à la Conciergerie.
Here is the End of All Things - 2011 - Graines de pissenlit, mouches, une chouette empaillée
nylon, plomb, acrylique - 4 cubes chacun 240 x 150 x 150 cm
Claire Morgan à la Conciergerie
Here is the End of All Things, la sculpture installation de Claire Morgan est à la fois ample et minutieuse, solide et fragile, poétique et mathématique. La dame blanche arrêtée en plein vol, oiseau empaillé défiant la gravité, introduit le chaos dans les fils rigoureusement tendus à égale distance qui forment quatre cubes. Le souffle de l'air anime les centaines de mouches et de graines ébourrifées.
Here is the End of All Things, 2011
Claire Morgan à la Conciergerie
Dans ce grand reliquaire, la chouette empaillée incarne la vulnérabilité de toutes choses, elle parle de vie et de mort. Légère comme un rêve et angoissante comme un cauchemar.
Détail des graines, Here is the End of All Things, 2011
Claire Morgan à la Conciergerie
«Beaucoup trouvent mon travail féminin, sans doute à cause des fils tendus autour des animaux captifs. L'équation classique : fil, couture, femme ? Je suis sculpteur, c'est peut-être plus masculin. Sans être agressive, je recherche une présence forte, une certaine puissance qui attire l'œil du public et le fasse penser. Je ne travaille pas dans le petit, le délicat, le mignon. En suspendant des objets dans l'espace, j'anticipe un changement, entre le statique et le mouvement.» déclare Claire Morgan. 1
Détail des mouches, Here is the End of All Things, 2011
Claire Morgan à la Conciergerie
"Mon oeuvre parle de notre relation avec le reste de la nature à travers les notions de changement, du temps qui passe et le côté éphémère de tout ce qui nous entoure. Pour moi, la création de structures apparemment solides ou de formes à partir des milliers d'éléments individuellement suspendus a une relation directe avec mon expérience de ces forces. Il y a un sentiment de fragilité et un manque de solidité qui chemine à travers toutes les sculptures. Elles se situent quelque part entre mouvement et immobilité, et donc en possession d'une certaine énergie." 2
Les quatre cubes de Here is the End of All Things, 2011
Claire Morgan à la Conciergerie
"Les titres des oeuvres sont importants et font référence à la l'histoire ou à la culture populaire contemporaine. ... Bien que les phrases aient une histoire spécifique, le choc entre le titre et la forme peut apporter une ambiguité voulue en créant une confusion volontaire." 2
Le titre "Here is the End of All Things" se réfère à "Hic terminus Haeret" un vers de l'Enéide de Virgile. Didon, abandonnée par Enée supplie les dieux de le punir.
Here is the End of All Things, 2011
Claire Morgan à la Conciergerie
"Hic terminus Haeret" est aussi la devise de Claude Gouffier, grand écuyer de France de François I à Charles IX, marquis de Caravas. Dans son château d'Oiron, où Claire Morgan a exposé, la devise latine est présente partout, dans la pierre, la céramique, les entablements. La devise est ambigüe. Elle peut vouloir dire ce château est une merveille et ne pourra pas être surpassé, ou ici tout se termine car j'ai atteint mon but, ou ici tout ce termine car Oiron est ma retraite et j'y mourrai. Terminus est un dieu romain, protecteur des limites, des bornes, des champs des territoires humains.
Les oeuvres de Claire Morgan forment tout un bestiaire: oiseau (the fall), écureuil, rat, taupe, papillon, héron posé sur un piédestal, renard (while you where sleeping, fantastic Mr Fox), lapin, mouette (gone withe the wind). Elle trouve dans la campagne des animaux morts et les empaille elle-même.
"Les processus nécessaires au travail sont laborieux, il y a des milliers d'éléments impliqués mais la clarté de la forme est de la plus haute importance. Je ne souhaite pas que les animaux fournissent un récit mais plutôt qu'ils introduisent un élément de mouvement, ou d'énergie, ou une sorte de réalité; qu'ils animent ou interagissent avec les plus grandes formes architecturales." 2
Fluid de Claire Morgan
« J'ai de l'aide pour mesurer les fils ou tenir les carrés de métal qui servent de lest. Je déteste l'idée de faire faire. Je taxidermise moi-même mes animaux, j'ai appris toute seule. Je m'en sers comme modèles pour dessiner, et comme matières premières que j'applique sur la feuille, des reliques. Je ne m'imagine pas commander la mort d'un animal pour faire une sculpture.» 2
Garden de Claire Morgan
Bêtes Off
Conciergerie, 2 boulevard du Palais, Paris 2è
Du 16 novembre 2011 au 11 mars 2012
Ouvert tous les jours de 9h30 à 18hsauf le 25 décembre et le 1er janvier
Dernier accès 45 minutes avant la fermeture.
Liens sur ce blog:
Bêtes off à la Conciergerie: dépouille fabuleuse, le tatou de Huang Yong Ping
Palagret
art contemporain
février 2012
Source:
1- in Le Figaro
Photos des oeuvres de Claire Morgan
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Par Palagret le 30 Janvier 2012 à 12:00
Une immense toile d'araignée a envahit la galerie Templon. Tissée par l'artiste japonaise Chiharu Shiota, le réseau de fil de laine noire va du sol au plafond. Quelques lampes jaunes éclaire Infinity par intermittence. La pulsation de la lumière fait vivre la toile.
Infinity de Chiharu Shiota, installation in situ
ampoules électriques, laine noire, pièce unique, dimensions variables
L'installation est une œuvre in situ, elle n'existe telle qu'elle qu'à la galerie Templon. Infinity peut être installée ailleurs mais elle sera différente. L'œuvre coûte 40 000€ non compris les frais de production.
Infinity de Chiharu Shiota, installation in situ
Dossier de presse
L’œuvre de Chiharu Shiota, mêlant performance, body art et installation, place le corps au centre de sa pratique sculpturale. L’artiste a été l’élève de Marina Abramovic à Hambourg dans les années 1990. Son langage artistique s’est nourri des influences des précurseurs Louise Bourgeois, Eva Hesse, ou Ana Mendieta, tant au niveau de l’expérimention physique et du travail sur l’inconscient qu’à travers le choix de matériaux délicats et traditionnellement liés à la féminité – tissus, fils.
Infinity de Chiharu Shiota, installation in situ
Avec sa série d’installations en fils entremêlés, débutée en 1996, Chiharu Shiota transforme l’œuvre d’art en extension de son propre corps absent - à l’image de la toile d’araignée produite par l’insecte.
L’artiste tisse de vastes environnements en fils de laine noirs qui emprisonnent des objets évocateurs - instruments de musique, robes de poupées, chaussures, lits. Ces objets, flottants, libérés de leur utilité première, nous renvoient à des visions poétiques et émouvantes. Ils convoquent des souvenirs, soulignent des absences.
« J’ai l’impression qu’il y a quelque chose de commun entre le silence du piano brûlé et le silence sur le trajet qui me ramène chez moi, et que cela est profondément enfoui dans mon cœur » révèle l’artiste.
Infinity de Chiharu Shiota, installation in situ
Le réseau graphique qui connecte les éléments évoque la puissance des liens interpersonnels, l’inévitable dépendance du sujet à ses racines, autant de relations mises à mal par l’individualisme de la culture occidentale contemporaine.
Infinity de Chiharu Shiota, installation in situ
« Les fils sont tissés l’un dans l’autre. Ils s’enchevêtrent. Ils se déchirent. Ils se dénouent. Ils sont comme un miroir des sentiments » écrit Chiharu Shiota.
Infinity de Chiharu Shiota, installation in situ
Née à Osaka au Japon en 1972, Chiharu Shiota vit et travaille à Berlin depuis 1997. Elle a suivi des études à l’Université des Arts de Berlin puis à l’Université des Beaux Arts d’Hambourg et a travaillé dans l’atelier de Rebecca Horn. Chiharu Shiota a performé et exposé, notamment, au Domaine de Kerguéhennec en 1997, au Kunstmuseum de Bonn en 2000, à l’Eglise Sainte Madeline à Lille en 2004, à la Neue Nationalgalerie à Berlin en 2006 et au National Museum of Art d’Osaka en 2008. Dans le cadre de la dernière Biennale de Venise, l’artiste a investi la Gervasuti Fondation avec « Memory of books ». Chiharu Shiota a également conçu le décor de l’opéra « Matsukaze » mise en scène par Sasha Waltz et montrée à Bruxelles au Théâtre royal de la Monnaie et à Berlin au Staatsoper en 2011.
Oeuvre de Chiharu Shiota
Chiharu Shiota : Infinity
Galerie Daniel Templon
Du 31 janvier au 18 février 2012
Du mardi au Samedi de 10h à 19h
30, rue Beaubourg 75003 Paris
Dans l'autre galerie Templon:
Néon et art contemporain: He An, enseignes brisées
Pascal Bernier, la séduction de l'araignée à Art Paris 2012
Palagret
art contemporain
janvier 2012
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Par Palagret le 28 Janvier 2012 à 12:00
Le 18 janvier, The Village Voice de New-York annonçait non sans humour la mort de Damien Hirst, très célèbre peintre de petits pois:
"Damien Hirst, l'artiste le plus riche du monde, est mort le 12 janvier à New-York à la suite de diverticulite aiguë provoquée par une spéculation crapuleuse, grossièrement cynique, dans un effort intellectuellement constipé de produire onze expositions de merde coûteuse et rabâché. Il avait 46 ans." 1
Zinc Lactate, 1999, détail, spot painting, Damien Hirst
Le Village Voice, souffrant sans doute d'indigestion devant "The Complete Spot Paintings: 1986–2011", les onze expositions de Damien Hirst dans les galeries Gagosian, étrille l'artiste trop célèbre et trop prolifique avec une cruelle nécrologie. L'éloge funéraire est une critique acerbe du "Young British Artist" assimilé à un homme d'affaire avisé faisant tourner sa petite entreprise de peinture à la chaîne. Hirst, roi du marketing, avoue avoir lui-même peint seulement cinq spot paintings avant de déléguer le travail à ses nombreux assistants.
Cephalosporin C, spot painting, Damien Hirst
Suite à la nécrologie du Village Voice, des journaux ont relayé l'information, de nombreux admirateurs ont exprimé leur tristesse sur Facebook. La mort annoncée de l'artiste anglais n'était qu'un brillant canular; Damien Hirst est bien vivant et prêt à produire un tableau avec un million de spots. Il lui faudra neuf ans pour finir son grand oeuvre, si le Village Voice et le marché ne l'enterre pas avant.
Damien Hirst posant avec le squelette se "St Elmo's fire"
La farce de sa fausse mort est assez drôle pour un artiste dont les oeuvres exploitent l'idée de la mort avec des crânes et des animaux coupés en deux dans du formol ou écorchés. Damien Hirst aime bien poser devant des squelettes en faisant le clown. La mort, même pas peur!
Spot paintings de Damien Hirst, Galerie Gagosian de Paris
Très bien exposés dans le white cube de la galerie Gagosian à Paris, les spot paintings de Damien Hirst ont un certain charme décoratif et donnent une impression de sérénité. Cependant, il serait sans doute fastidieux de voir les dix autres expositions dans le monde.
Certains amateurs fortunés se prêtent au jeu et font le tour des galeries Gagosian de Rome à Hong-Kong et de New-York à Athènes. Les globe-trotteurs font tamponner une carte attestant de leur visite et quand tous les ronds sont remplis, ils gagnent une oeuvre sur papier de Damien Hirst. Il n'est pas précisé si l'oeuvre est réalisée par l'artiste lui-même ou par un assistant.
Zinc Lactate, 1999, spot painting, Damien Hirst
Les tableaux qui pourraient être simplement numérotés ou classées par taille portent des noms compliqués de substances chimiques. Ils sont regroupés en série: antibiotics, controlled substances, sedatives, radio chemicals, venoms. Les jolis pois colorés sont ainsi associés à des dénominations anxiogènes. Les pois sont aussi des pilules pharmaceutiques pour nous calmer ... ou nous énerver.
N-Methylurea, 2005, Household gloss on canvas
120 x 120 inches (304.8 x 304.8 cm), Damien Hirst
DAMIEN HIRST
The Complete Spot Paintings 1986-2011
Du 12 janvier au 18 février 2012Galeries Gagosian de: Athens - Beverly Hills - Britannia street, Londres - Davies street, Londres - Genève - Hong-Kong - Paris - Rome -Madison avenue, West 21st street, West 24st street à New-Yorkrue de Ponthieu, Paris 75008Liens sur ce blog:
Damien Hirst défie les galeries avec sa vente aux enchères
Yayoi Kusama et l'obsession des petits pois (dots) à La Villette
Palagret
art contemporain
janvier 2012
Source:
1- Damien Steven Hirst, the world's richest artist ($332 million according to Britain's Sunday Times), full-time businessman, part time art-collector, sometime restaurateur, P.T. Barnum imitator, and most famous member of the Young British Artists (or YBAs), a creative covey who came to prominence in the 1990s, died last Thursday, January 12, in New York following complications from acute diverticulitis brought on by a swinishly speculative, grossly cynical, intellectually constipated effort to pinch out 11 concurrent exhibitions of rehashed expensive crap. He was 46.
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Par Palagret le 21 Janvier 2012 à 12:00
Dans l'obscurité de la nuit, He An vole des lettres de néon aux enseignes lumineuses de Wuhan, sa ville natale, comme il l'explique dans son interview:
" Je suis né à Wuhan, j’ai grandi dans cette ville et à la fin, elle m’a rejetée. C’est avec des moyens un peu puérils que j’essaie de me ré-approprier l’amour de cette ville."
He An, néons à la galerie Daniel Templon
"Tout ce que j’ai appris, je l’ai appris dans cette ville. Mais aujourd’hui, c’est comme si j’avais vécu un rêve et que je me réveillais. Tout a changé. On a du mal à distinguer ses rêves de la réalité." ... "C’est probablement un sentiment commun à toute ma génération, car l’urbanisme chinois s’est tellement développé, la ville a tellement changé, que tout le monde a cette sensation de se faire rejeter dans le vide dans le néant "
He An, néons à la galerie Daniel Templon
L'enseigne publicitaire est détournée de son utilité commerciale, elle ne propose plus des biens à acheter mais diffuse des message intimes.
« Chaque idéogramme volé est une parcelle de l’âme de ma ville que je me ré-approprie. Je transforme l’âme de ma ville et ma propre âme. »
He An, néon Yoshioka Miho
Etudiant, He An était fasciné par Yoshioka Miho, une actrice porno japonaise, dont il regardait les cassettes clandestinement, le porno étant interdit en Chine à l'époque. En hommage à l'égérie érotique de son adolescence, il épelle son nom en idéogrammes, un écho aux chambres du Red Light District, le quartier de la prostitution.
"C’est un peu comme voler le sous-vêtement d’une fille. ... Il ne s’agit pas de le dérober, mais de voler un fantasme à son sujet, un morceau d’elle. C’est une assimilation psychologique et imaginaire".
He Taoyuan, néon de He An en hommage à son père
Eparpillés sur le sol de la galerie Templon, des idéogrammes en mauvais état forment le nom du père de He An, « He Taoyuan », un ouvrier brisé par le système communiste selon lui. Après la mort de son père, He An est parti à la recherche de signes composant le nom de celui-ci.
He Taoyuan, néon de He An en hommage à son père
"A Wuhan, certains de mes amis font maintenant partie de bandes criminelles. D’autres occupent des postes importants dans la police. L’un de mes amis en est. Pour créer mes œuvres, j’ai négocié avec lui : tous les jours il met à ma disposition quatre ou cinq malfrats qui se procurent une voiture et viennent m’accompagner à la recherche des idéogrammes. Il les repèrent et les font tomber des immeubles, puis s’enfuient avec. Pour moi, c’était le moment le plus romantique, le plus beau de toute ma vie. Pendant l’hiver, la nuit, personne dans les rues, je me sens vraiment le roi de la ville ».
Let's see whether brother can help her, He An
Interview de He An
En 2000 à Shenzhen, He An installe dans la rue un néon rouge long de douze mètres disant en chinois: "Tu me manques, s'il te plait appelle moi" suivi de son numéro de portable. Des centaines de gens l'ont appelé, la plupart ignorant sans doute qu'il s'agissait d'une œuvre d'art.
En 2008 à Birmingham, sur le toit du parking Digbeth sur Moat Lane, He An proclamait en néon blanc: "I talked to Ah Chang on the way to work. After work I ended the relationship. I stood in Paradise Circus and cried for hours…" , "J’ai parlé avec Ah Chang en allant au travail. Après le travail, j’ai mis fin à notre relation. Je suis resté des heures à pleurer à Paradise Circus." Les lettres latines et les idéogrammes chinois formant un extrait de l'histoire intime de He An sont restés plus d'un an sur le toit du garage, laissant perplexes les passants.
Enseigne de néon blanc de He An à Birmingham, 2008
En collectant ou dérobant des enseignes de néon usées par le temps, He An lutte contre la perte de sens, faisant un travail subversif non dénué de sentiments, entre journal intime et détournement ironique.
La galerie Daniel Templon, impasse Beaubourg
He An, artiste conceptuel chinois est né en 1972, après la Révolution Culturelle. Il explore les interdits et les évolutions de sa culture. En Chine, les villes sont détruites et reconstruites si vite que les habitants se sentent perdus dans cet univers éphémère.He An
Du 05 novembre au 24 décembre 2011
du mardi au samedi de 10h à 19h
Galerie Daniel Templon, Impasse Beaubourg, 75003 Paris.
Liens sur ce blog:
Palagretjanvier 2012art contemporain
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Par Palagret le 15 Janvier 2012 à 12:00Quelques plasticiens du néonDepuis les années soixante, Dan Flavin crée une œuvre minimaliste, loin des jeux de mots et des slogans politiques. Abstraits, les néons colorés se reflètent sur toutes les surfaces de la pièce créant un espace poétique proche du rêve.Installations de Dan Flavin
untitled (to the innovator of Wheeling Peachblow) 1966-68
pink out of a corner (to Jasper Johns) 1963Entre fantasme, désillusions et souffrance, Tracy Emin raconte, exhibe sa vie cassée (broken life) dans des quilts, tableaux, dessins, installation et néons.Vibrantes comme des publicités, les phrases en lettres manuscrites de Tracy Emin nous interpellent sur un ton romantique: Ainsi elle inscrit ""You Forgot to Kiss My Soul", "tu as oublié d'embrasser mon âme". D'autres néons ont, comme ses tapisseries ou dessins, une tonalité plus crue, plus explicite."You Forgot to Kiss My Soul", 2007, Tracy EminPale Pink and White Neon, 45 1/2 x 55 5/16 inchesCarsten Höller, plasticien allemand, expose à Beaubourg un manège brillant de néons blancs, comme une attraction foraine. En 2007 à la Tate Modern, cinq toboggans géants accueillaient un public enthousiaste qui se laissait glisser dans les tubes transparents. Art ou divertissement?Le manège de Carsten Höller à Beaubourg en octobre 2009
Le plasticien chinois Li Songsong est lui aussi adepte du néon. Il a réalisé "new world order" un tank fait de bois et de tubes fluorescents blancs. Sa dernière création est un monumental sac Lady Dior en tubes de néons blancs, exposé à Pekin. "Dior & chinese artists" est une commande à la gloire de la maison de couture Dior. Les artistes chinois (Zang Xiaogang, Wang Gongxing, Liu Jianlua, Lu Hao, Zhang Huan etc) n'ont pas hésité à mêler art et commerce. Les oeuvres entreront dans le fond LVMH.
Li Songsong
Tank, 2005
bois & tubes fluorescents
Stricto sensu, les néons n'émettent qu'une seule couleur: le rouge orangé. Dans le langage commun cependant, tous les tubes fluorescents sont appelés néons, même s'ils fonctionnent avec d'autres gaz inertes comme l'argon ou l'hélium.A suivre, autres plasticiens du néon:Anselm Reyle, David Bachelor etc ...Liens sur ce blog:Néon et art contemporain: Mario Merz et l'igloo de Giap
Néon et art contemporain: He An, enseignes brisées
Palagretjanvier 2012néon et art contemporain
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Par Palagret le 3 Janvier 2012 à 12:00
A côté des miroirs et des ballons aux petits pois, une troisième installation de Yayoi Kusama est exposée à Beaubourg. "I'm here but nothing" représente une salle à manger. Les objets du quotidien, vaisselle, étagères, commode, qui furent jadis le théâtre de l'hallucination de Yayoi enfant deviennent un décor de fantaisie pour petite fille. Alice au pays des merveilles est-elle invitée au festin?
Portrait de Yahoi Kusama semé de pois (dots) colorés
"I'm here but nothing", détail
Il n'y a pas de nappe sur la table dressée comme dans l'expérience fondatrice de Yayoi Kusama. Le motif hallucinatoire de la nappe s'est transmué en une multitude de gommettes colorées collées sur les murs et les objets que les quatre néons ultra-violets du plafond font briller.
"I'm here but nothing", installation de Yayoi Kusama
C'est joli et féerique mais l'obsession des pois contredit cet apparent bonheur. Ce n'est pas un conte de fée mais un cauchemar. Le titre " je suis ici mais je ne suis rien" nous rappelle l'anéantissement recherché par Yayoi Kusama:
"L'auto-destruction est le seul chemin vers la paix."
"I'm here but nothing", installation de Yayoi Kusama
Au contraire des spots paintings de Damien Hirst, les dots ou pois de Yayoi Kusama sont de tailles différentes et leur espacement varie. Moins rationnels, moins mécaniques, les dots de la plasticienne japonaise sont d'apparence plus ludique même si leur thématique est plus sombre.
"I'm here but nothing", installation de Yayoi Kusama
Yayoi Kusama, Beaubourg, Galerie sud
10 octobre 2011 - 9 janvier 2012
11h00 - 21h00
Liens sur ce blog:
Yayoi Kusama à Beaubourg: se perdre dans l'infini des miroirs
Palagretjanvier 2012art contemporain1- in Code couleur 11, revue du Centre Pompidou
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